Nemo auditur… et précarité

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ruptureIl est, en matière de rupture des relations commerciales, une exception à la nécessité d’accorder un préavis à son partenaire : la précarité de la relation commerciale. C’est, à vrai dire, une condition d’application du texte applicable en la matière, l’article L.442-6.I.5° du Code de commerce, qui vise l’existence de « relations commerciales établies« . Une relation précaire n’étant pas établie, par définition, cet article n’est pas applicable.

La jurisprudence a connu plusieurs applications, dont un bref pas de deux autour de l’existence de relations commerciales qui seraient précaires par nature.

Mais cette précision a aussi eu pour effet d’inciter certains professionnels à imprimer délibérément, voire artificiellement, une telle précarité à la relation, dans l’espoir de la voir échapper à l’application de cette disposition. Ce fut notamment le cas d’une mise en concurrence fictive, le fait de recourir à un appel d’offres étant considéré comme imprimant un caractère précaire à une relation.

C’était également le cas d’une espèce signalée par le révéré Professeur Mathey dans son dernier commentaire (Contrats Concurrence Consommation n° 11, Novembre 2014, comm. 242, Rupture brutale et détermination du délai de préavis raisonnable) . La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 12 septembre 2013 (Omnitrade c. Poweo Direct Energie) a refusé d’admettre qu’une relation commerciale ait été empreinte de précarité parce qu’elle avait imposé, à trois reprises, des périodes d’essai conséquentes à son partenaire.

La Cour suit son contradicteur qui relevait que les contrats étaient renouvelés sans modification et que l’imposition de longues périodes d’essai était contradictoire avec l’objectif de fort développement imposé. Le raisonnement à cet égard n’emporte pas pleinement la conviction mais il convient surtout de relever que le caractère artificiel de la précarité, faussement imposée par un partenaire, a fait obstacle à la stratégie développée.

Au-delà de ce cas précis, c’est aussi, tout simplement, l’application de l’adage connu, nemo auditur propriam turpitudinem allegans, soit nul ne peut invoquer sa propre turpitude.

 

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7 novembre 2014 |

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