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Distribution duale : nouveau régime & permanences

18 janvier 2023 par

Depuis quelques années déjà, avec l’avènement de la vente en ligne, la distribution duale a quitté l’anecdotique pour pendant longtemps, est devenue une modalité fréquente de distribution – suscitant souvent les critiques des détaillants, craignant souvent de servir de « cabines d’essayage » à des clients, qui concluraient leur achat en ligne en partie sur le site du fabricant. Si l’on pense facilement à la vente de vêtements, des concessionnaires automobiles ont pu protester contre le fait d’être réduits à la préparation et à la mise en circulation de véhicules vendus par la marque sur son propre site.

Dans son nouveau règlement applicable aux restrictions verticales de concurrence (le règlement n°2022/720 du 10 mai 2022), la Commission européenne a précisé son approche de la conformité de cette pratique au droit de la concurrence.

Dans le considérant 12 du Règlement, elle décrit ainsi la double distribution:

La double distribution renvoie au scénario dans lequel un fournisseur vend des biens ou des services non seulement en amont, mais aussi en aval, concurrençant ainsi ses distributeurs indépendants.

Il n’est pas sûr toutefois que l’approche concurrentielle soit d’une grande aide pour lesdits distributeurs indépendants. Aussi, avant d’y venir, il peut être utile de rappeler que le simple droit des obligations (ou contrats) est susceptible d’apporter des tempéraments à cette pratique, répondant aux craintes et critiques des distributeurs exposées plus haut.

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Brèves de relations commerciales

5 juillet 2021 par

Rupture : le champagne était de trop.

Et à vrai dire, le séjour à l’Île Maurice également.

La société Carrefour Marchandises International (Carrefour) a mis un terme immédiat aux relations commerciales qui l’unissaient avec une société spécialisée dans l’édition d’ouvrages, ainsi que la conception de livres coffrets et de calendriers. Elle a également annoncé à son partenaire son refus de prendre livraison de plusieurs commandes passées, décisions suffisamment conséquentes pour avoir justifié une condamnation de Carrefour à plus de 500.000€ en première instance.

Carrefour a en effet constaté que son président avait offert des cadeaux et voyages dont une mallette, un voyage à l’île Maurice tous frais payés… et une caisse de champagne, en échange du référencement de ses produits.

La Cour d’appel de Paris, dans un arrêt en date du 5 mai 2021, juge que ces faits caractérisaient des procédés déloyaux, outre la violation de la charte éthique de Carrefour dont son partenaire avait connaissance. Dans ces conditions, l’article L.442-1 II du Code de commerce réservant la possibilité de rompre une relation commerciale sans préavis en cas d’inexécution du partenaire, la Cour juge fondée la rupture sans préavis.

Elle juge également fondé le refus de prendre livraison des commandes déjà passées, considérant que ces faits constituent une fraude et des manœuvres dolosives qui ont affecté le consentement de Carrefour.

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Changer de contractant n’est pas une modification substantielle de la relation commerciale.

C’est la solution contre-intuitive qu’a énoncé la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 31 mars 2021. L’affaire illustre bien la spécificité du domaine des ruptures brutales de relations commerciales établies.

En l’espèce, une société de fabrication d’emballages en verre, Verralia (ex Saint Gobain Emballages) distribuait ses produits par l’intermédiaire de trois sociétés coopératives agricoles, qui ont décidé de se regrouper au sein d’une même entité pour leurs achats.

Verralia a fait connaître son opposition à cette opération et, donc, son refus de cesser la facturation aux trois sociétés. En conséquence, les trois sociétés ont informé Verralia de l’arrêt de leurs relations, avec un préavis très bref, d’un mois. Verralia a assigné ces sociétés au titre de la rupture brutale de relations commerciales établies, considérant qu’elles lui avaient opposé une modification substantielle de la relation commerciale.

Rappelons qu’en effet une rupture peut être partielle ou totale, ou résulter encore de la modification substantielle de la relation, que ce soit de nature tarifaire (par exe, augmentation conséquente des prix) ou non tarifaire (par exe, changement important des conditions de paiement).

La solution est discutable compte tenu des conséquences possibles d’un regroupement à l’achat, mais le fait est que la Cour de cassation a estimé que le changement d’identité de cocontractant ne caractérisait pas suffisamment la modification de la relation commerciale. Il faut rappeler que la matière concerne la rupture de relations commerciales, notion dégagée délibérément pour la distinguer des relations contractuelles. La Cour de cassation a d’ailleurs déjà eu à juger qu’une relation commerciale pouvait commencer avec une personne, morale ou physique, et se poursuivre avec une autre.

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A l’orée de l’Euro, Google interdit les paris sportifs

23 juin 2016 par

foot2Ce que la loi française n’a pas fait, Google le fait. A l’orée même de l’Euro 2016, le 10 juin 2016, Google a supprimé l’application PMU Sports Live, et interdit les bannières publicitaires dans des applications tierces redirigeant vers des sites de jeux d’argent ou de hasard, dont ceux du PMU. Il est permis de douter sans cynisme que les considérations morales l’aient emporté – la politique Google n’étant pas la même sur son moteur de recherche – et tel n’est pas l’objet de ce billet.

La possibilité d’interdire à un professionnel l’accès à un service, ou de lui supprimer cet accès, est en revanche au cœur de cette ordonnance de référé, notamment dans le cas où d’autres opérateurs y gardent accès. Lire la suite »

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Le préavis du plus fort est toujours le meilleur

13 janvier 2016 par

loupetagneauSelon la Commission d’Examen des Pratiques Commerciales,

« La clause imposant aux pharmaciens de maintenir un certain volume de commandes durant la durée du préavis exécuté en cas de rupture des relations commerciales et prévoyant une clause pénale en cas de non-respect de cette obligation n’apparaît pas déséquilibrée au sens de l’article L442-6-I, 2° du code de commerce, dès lors que la pénalité semble conforme aux bonnes pratiques. »

Cet avis, en date du 15 décembre 2015, qui emprunte quelque peu à la forme du truisme, est notamment intéressant en ce qu’il rappelle l’incitation de la CEPC à introduire des délais de préavis dans les contrats, mais il suscite quelques observations. Lire la suite »

Une interdiction partielle de la vente en ligne est-elle possible ?

15 mai 2014 par

bangNous avions, en leur temps, évoqué ici les décisions rendus dans deux affaires emblématiques en matière de distribution sélective et de vente en ligne : les affaires Pierre Fabre et Bang & Olufsen.

Cette dernière affaire a très vraisemblablement connu son épilogue devant la Cour d’appel de Paris, par l’arrêt du 13 mars 2014. Il est probable, en effet, que la société Bang & Olufsen ne se sera pas pourvue en cassation, ayant vu son amende réduite de 900.000€ à 10.000€ pour des faits somme toute assez qualifiés.

C’est d’ailleurs un premier point intéressant de cette décision : la Cour d’appel a tenu compte du contexte d’incertitude juridique dans lequel les pratiques en cause se sont déployées pour considérer que leur gravité était atténuée.

Elle relève en effet qu’elle avait elle-même jugé nécessaire, dans l’affaire Pierre Fabre, de saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne d’une question préjudicielle destinée à déterminer si l’interdiction de vente sur Internet constituait ou non une restriction de concurrence caractérisée.

Sur le fond, on se souvient (et, à défaut, on retrouvera) que Bang & Olufsen a tenté de nier l’existence d’une interdiction de vente sur Internet, en affirmant que les documents contractuels n’interdisaient que la vente à distance. Cette défense n’a convaincu ni l’Autorité de la concurrence ni la Cour d’appel, au regard d’éléments factuels précis démontrant l’existence pratique d’une telle interdiction. Lire la suite »

[Concurrence] Ecoutez-les : ils s’entendent !

14 mars 2014 par

écoutesDu majordome au conseiller politique, l’écoute ou l’enregistrement connaît un regain de popularité sur laquelle il conviendrait de s’interroger, mais en d’autres lieux : ceci dit-il quelque chose de la conception de la loyauté dans notre société ?

Au-delà même de ces enregistrements ou écoutes privées, les écoutes judiciaires sont également sur toutes les lèvres, pour des raisons de politique politicienne mais également pour des raisons de politique au sens noble. Car, à travers les perquisitions menées chez des avocats et les écoutes, « par ricochet » trop appuyé, ce sont les principes de la profession et les droits de la défense qui sont mis en cause.

Qu’il soit permis dès lors de relayer ici l’inquiétude des avocats pénalistes et ce, d’autant plus que, outre la solidarité confraternelle et la préoccupation du simple citoyen, les écoutes téléphoniques concernent également le praticien du droit de la concurrence – et celui-ci entend bien ne pas se trouver sur écoutes « par ricochet » dans l’exercice de sa mission de conseil et de défense de ses clients. Lire la suite »

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Class-action à la française : c’est (presque) parti

14 février 2014 par

foule2Elle était en discussion depuis tant d’années, elle est désormais adoptée. Le projet de loi relatif à la consommation, instaurant ce que le droit français dénomme une « action de groupe » a été voté le 13 février 2014.

Ce nouveau type d’action judiciaire est susceptible d’avoir un impact important, dans la mesure où il met notamment fin à une relative impunité dans le cadre des petits litiges de la consommation (pour lesquels les consommateurs renonçaient à agir isolément). Il intéresse également tout particulièrement les pratiques anticoncurrentielles (ententes et abus de position dominante) qui sont le seul type de pratiques expressément visées par loi. Voilà qui, additionné aux sanctions pécuniaires, pourrait se montrer de plus en plus dissuasif pour les entreprises qui se rendent responsables de telles pratiques. Lire la suite »

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e-Distribution : le web est libre

18 octobre 2013 par

petitwebChacun connait l’attachement viscéral des internautes et plus encore des thuriféraires historiques du web à une liberté sans entraves.

Internet est encore perçu par certains comme un espace vierge sur lequel les lois nationales n’auraient pas prise. Il est vrai que le web a pour caractéristique de mettre à mal toute notion de territoire. La distribution avait ainsi nécessairement vocation à être bousculée par le web, tant elle est marquée par la notion de territoire. Les solutions adoptées sont, selon les cas, favorables ou non aux distributeurs.

L’année 2013 n’a pas manqué de l’illustrer à plusieurs reprises, et encore récemment, avec la décision rendue par la Cour de cassation le 10 septembre 2013, dans le domaine de la franchise. Lire la suite »

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40.000.000 € pour dénigrement

5 juin 2013 par

denigrement21-300x292Le dénigrement constitue une pratique de concurrence déloyale. La qualification est connue.

Mais il peut également constituer un abus de position dominante, sous certaines conditions.

C’est à ce titre que l’Autorité de la concurrence a condamné la société Sanofi-Aventis à une sanction pécuniaire d’un montant de 40.600.000 €, par une décision en date du 14 mai 2013. Une fois encore, il se vérifie que des opérateurs en situation de domination incontestée n’en ménagent pas pour autant leurs efforts pour porter le discrédit sur des nouveaux entrants.

L’Autorité a ainsi condamné Sanofi-Aventis pour avoir dénigré des médicaments génériques susceptibles de venir en substitution du Plavix, en instillant le soupçon sur la fiabilité de ces génériques.

Le Plavix est un médicament utilisé pour la prévention des récidives des maladies cardiovasculaires graves, 4ème médicament le plus vendu au monde, représentant en 2008 le premier poste de remboursement de l’Assurance maladie en France, pour un montant de 625 millions d’euros. A l’évidence, ce contexte et l’impact sur les comptes sociaux sont entrés en ligne de compte dans l’appréciation du dénigrement. Lire la suite »

Est-ce la fin de l’interdiction de la revente à perte ?

8 avril 2013 par

caddiesLa Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) vient de rendre une décision qui pourrait bouleverser radicalement l’équilibre – relatif et instable – des relations industrie-commerce, en conduisant à la suppression de l’interdiction de la revente à perte. Des inquiétudes commencent à poindre en France à cet égard et, certains soutiennent « catégoriquement » que la loi française serait contraire au droit communautaire. Ce n’est pas si sûr.

En effet, si l’on interprète strictement l’ordonnance du 7 mars 2013 rendue dans l’affaire Euronics Belgium contre Kamera Express, cette interdiction serait contraire au droit européen. Ceci pourrait entraîner une recomposition du secteur de la distribution sur laquelle les avis des spécialistes de la distribution divergent. Certains mettent en avant une baisse des prix aux consommateurs, d’autres soulignent l’impact probable sur les marges des fournisseurs, peu souhaitable en période de crise. Le secteur étant particulièrement déséquilibré – puisque sept grandes enseignes font face à 36 000 fournisseurs – la pression sur les fournisseurs serait encore accrue. Lire la suite »